Responsable d’investissement chez Sinergi Burkina, Davy Soubeiga analyse l’impact de la pandémie de covid-19 sur la stratégie d’investissement et sur les entrepreneurs accompagnées par Sinergi Burkina.
Pourriez-vous en, quelques mots, décrire Sinergi Burkina ?
Sinergi Burkina est la première société d’investissement dédiée aux petites et moyennes entreprises (PME) du Burkina Faso créée en 2014. Nous sommes actuellement 6 employés dont un tiers de femmes. Nous finançons les PME pour des montants compris entre 20 millions FCFA et 200 millions FCFA, en prenant des participations minoritaires pour une période de 4 à 7 ans, et en offrant des prêts d’actionnaires.
En tant que partenaire actif, nous levons des fonds additionnels pour les PME auprès de programmes partenaires tels que le programme PACE de l’Agence des Etats-Unis pour le développement (USAID), les programmes I&P Accélération au Sahel et I&P Accélération Technologies initiés par Investisseurs et Partenaires pour du financement d’amorçage avec du crédit taux zéro, mais également le Programme de Croissance Economique dans le Secteur Agricole (PCESA) mis en place par l’ambassade danoise avec de la subvention d’investissement et d’exploitation.
Nous avons actuellement 4 entreprises en portefeuille d’investissement, 11 en amorçage, et 7 en facilitation auprès du PCESA.
La crise de la covid-19 a-t-elle impacté vos échanges avec les entreprises en portefeuille ?
La crise sanitaire mondiale que nous avons connu cette année a en effet eu un impact sur nos relations avec les entreprises en portefeuille. Dans le respect des mesures barrières édictées par le gouvernement, nous avons adapté notre suivi de proximité auprès des entrepreneurs, en privilégiant les appels et vidéo conférences. Ainsi les réunions en présentiel et les visites d’entreprise ont été réduites (en respectant les mesures barrières), et même annulées pendant le pic de la crise.
Comment les entreprises en portefeuille ont-elles été affectées par la crise ?
La crise a impacté nos entreprises en portefeuille de plusieurs manières : la baisse de la demande a entrainé une baisse de production dans l’agro-industrie, la fermeture temporaire d’unités de production pour éviter la contagion. La mise en quarantaine des villes a entrainé des difficultés d’approvisionnement et de distribution et un arrêt total des activités dans le domaine de l’éducation. Les difficultés de levée de fonds auprès des institutions financières ont aussi retardé l’acquisition et la livraison d’équipements de production. Enfin les charges imprévues pour l’acquisition de matériel d’hygiène (gel hydroalcoolique, lave-main, cache-nez, thermomètre…) ont connu une hausse de prix exponentielle.
Ces entreprises ont cependant fait preuve de résilience, et certaines ont même pu saisir l’opportunité pour adapter leur offre. C’est le cas de Palobde qui produit des serviettes hygiéniques pour femmes à base de pagnes tissés, et qui a pu se reconvertir à la production de cache-nez lavables permettant ainsi de multiplier son chiffre d’affaires par trois.
Quelles mesures avez-vous pris pour appuyer les entreprises pendant la crise ?
Nous avons tout d’abord analysé l’exposition de nos entreprises accompagnées, participé aux réflexions stratégiques de résilience, et levé des fonds pour aider nos partenaires faces à ces difficultés.
Comment la crise du covid-19 a-t-elle impacté vos activités ?
L’équipe de Sinergi Burkina a continué ses activités par télétravail jusqu’au déconfinement progressif entamé fin mai toujours dans le respect strict des mesures édictées par le gouvernement. Le flux des demandes de financement n’a pas connu de baisse réelle malgré un ralentissement de la prospection. Nous avons au contraire reçu des demandes additionnelles de la part de nos entreprises en portefeuille pour faire face aux effets de la crise sanitaire.
Les activités du cluster burkinabé du Club Africain des Entrepreneurs ont cependant pris un coup. La dernière activé date du 13 mars dernier, 4 jours après les premiers cas du Burkina, et quelques jours avant le confinement total.
Quels types de soutien et d’accompagnement complémentaires sont nécessaires, de la part d’I&P, des pouvoirs publics, d’autres acteurs de l’écosystème… pour aider les entrepreneurs ?
La mise à disposition des financements dans le cadre du covid-19 est à encourager avec éventuellement un plafond plus élevé. L’Etat burkinabè a signé un accord-cadre avec l’Association Professionnelle des Banques et Etablissements Financiers du Burkina Faso, une convention entre dans le cadre de la mise en place du Fonds de financement pour soutenir les entreprises fortement impactées par la Covid-19. Les prêts aux entreprises seront au taux de 4% à travers un mécanisme de bonification supporté par l’Etat à hauteur de 5 milliards de FCFA.